Je dis qu’il n’y a guère en Europe de ville et de bourg où le sang n’ait coulé pour des querelles de religion ? Je dis que l’espèce humaine en a sensiblement diminué parce qu’on massacrait, aussi bien les femmes et les filles que les hommes. Je dis que l’Europe serait plus peuplée d’un tiers s’il n’y avait point eu d’arguments théologiques. Je dis enfin que loin d’oublier ces temps abominables, il faut les remettre fréquemment sous les yeux pour en inspirer une horreur éternelle et que c’est notre siècle à faire amende honorable par la tolérance, pour ce long amas de crimes que l’intolérance a fait commettre pendant seize siècles de barbarie. Qu’on ne me dise donc point qu’il ne reste plus de trace du fanatisme affreux de l’intolérance Elles sont encore partout, elles sont dans les pays mêmes qui passent pour les plus humains. Les prédicants luthériens et calvinistes, s’ils étaient les maîtres, seraient peut-être aussi impitoyables, aussi durs, aussi intolérants qu’ils reprochent à leurs antagonistes de l’être. »