Pourtant, sa qualité première est la clarté, la précision, la rigueur, dans l’expression et la logique dans l’exposé des idées. Et son ouvrage est bourré de données extraordinaires sur les formes de vie. C’est absolument captivant. Sa pensée se nourrit de science. Et, dans ce domaine, il fait preuve d’une érudition peu commune, passant de la biologie à l’astronomie, de la chimie organique à la physique quantique avec une aisance déroutante. Or, on se souviendra qu’à l’ère des philosophes grecs, philosophie et science étaient intimement liées. Petit à petit, elles se sont éloignées l’une de l’autre. La science s’est divisée en spécialités multiples. Aujourd’hui Heymans les réunit à nouveau. C’est au départ de son analyse des données scientifiques les plus récentes qu’il aboutit à cette conclusion hypothétique surprenante : il n’y a pas de matière sans élément immatériel ! Rien à voir avec l’antimatière. Il s’agit d’une qualité immanente de la matière. Ceci remet en cause toute la pensée traditionnelle qui défend soit l’idée d’un matérialisme absolu, soit celle d’un dualisme matière-esprit. Le principe «immatériel » de Heymans n’est ni « spirituel », ni « divin ». Il ne suppose pas plus un « grand dessein ».
Au départ de tout on trouve exclusivement l’énergie. « L’énergie considérée uniquement en elle-même est une force aveugle, sans discernement Entièrement laissée à son action, elle s‘autodétruirait constamment (…) Nécessairement, l’énergie est munie de propriétés immatérielles qui se font valoir en rendant l’énergie sensible à sa propre préservation et consciente de ce qu’elle est » Cet espèce d’instinct intuitif de l’immatériel de la matière, intimement liée à celle-ci, permet une adaptation aux circonstances et un développement adéquat. La potentialité immatérielle accompagne toute transformation de la matière et elle croît et se complexifie avec elle. En un certain sens on pourrait dire que Heymans est un Darwin de la philosophie. Il n’est pas près de soutenir le « créationnisme ». Il y a une logique dans le développement de la vie qui a dû adapter ses formes innombrables en fonction des événements grâce aux propriétés immatérielles de l’énergie : la sensibilité, l’autoconscience, l’autoconnaissance et la mémoire. « il n’y a pas eu de dessein intelligent qui aurait rapidement guidé vers un but précis. Seule peut être retenue une tendance pour la vie à se maintenir et à se faire valoir. » L’achèvement de l’immatériel est l’intelligence. Et le siège de l’intelligence étant le cerveau, Heymans consacre à notre organe intracrânien une attention particulière. L’Homo Sapiens Sapiens, est responsable de bien des horreurs sur la Terre. On peut dire qu’il se sert très maladroitement de sa faculté d’intelligence. A tel point qu’il met en péril sa propre survie. On peut espérer qu’après une évolution de quelques milliards d’années, il accélèrera son épanouissement.
« Le problème essentiel est de diriger l’humanité vers d’autres voies. C’est possible et urgent. Heymans entrevoit qu’une nouvelle civilisation sort lentement des limbes. L’appel qu’il lance à la fin de son ouvrage pour que les jeunes bâtissent un monde nouveau « avec plus de paix, de tolérance, d’entraide, de joie » peut paraître naïf . C’est compter sans le caractère inéluctable d’une catastrophe si le changement de mentalité et de comportement ne se produisait pas. « Il faut que se crée de par le monde une prise de conscience qui s’inspire des principes de l’universalisme. L’humanité deviendra alors moralement et intellectuellement mature. »
La civilisation se trouve devant un tournant décisif. Pour aider à le prendre, Heymans avance une série de propositions concrètes qui pourraient servir de base à un manifeste politique mondial.
André Heymans – L’Universalisme, philosophie de l’espoir – Ed.Le roseau vert. - Courriel : andreheymans@skynet.be